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Relaxe ou condamnation, les 16 chasseurs jugés pour une battue illégale qui a abouti à la mort d'un ours, espèce protégée, en 2021 dans les Pyrénées, connaitront mardi la décision du tribunal correctionnel de Foix.
Lors du procès le 19 mars, le procureur a requis quatre mois de prison avec sursis contre le chasseur de 81 ans, auteur du tir mortel après avoir été blessé par Caramelles, une femelle de 150 kg, accompagnée de deux oursons.
Il a également requis deux ans d'interdiction de port d'arme, deux ans de suspension du permis de chasse et 1.800 euros d'amende à son encontre.
Contre les 15 autres chasseurs ayant participé à la battue illicite dans une réserve naturelle d'Ariège, le procureur Olivier Mouysset a demandé des suspensions du permis de chasse et des amendes.
Les avocats de la défense ont demandé la relaxe des chasseurs.
"Je suis dans l'attente sereine du jugement à venir", a dit à l'AFP Charles Lagier, avocat du chasseur auteur du tir mortel, avant le délibéré.
- "Légitime défense" -
A la barre du tribunal, le principal prévenu a admis avoir ouvert le feu sur l'ourse, en état de "légitime défense".
"Elle m'a attrapé la cuisse gauche, j'ai paniqué et j'ai tiré un coup de carabine. Elle a reculé en grognant, elle m'a contourné et m'a mordu le mollet droit, je suis tombé, elle me bouffait la jambe, j'ai réarmé ma carabine et j'ai tiré. Elle est morte cinq mètres plus bas", a-t-il relaté.
En 2008, un autre chasseur avait été jugé pour avoir abattu une ourse dans les Pyrénées-Atlantiques quatre ans plus tôt. Relaxé en première instance, il avait été condamné en appel à indemniser diverses associations de protection de la nature à hauteur de 10.000 euros.
L'association communale de chasse (ACCA) à laquelle il appartenait a été condamnée à 53.000 euros de dommages et intérêts pour la mort de Cannelle, la dernière ourse de souche pyrénéenne.
Caramelles et Canelle ont été naturalisées et sont aujourd'hui visibles au Muséum d'histoire naturelle de Toulouse.
Menacée d'extinction au début des années 1990, la population d'ours bruns s'est considérablement développée dans les Pyrénées grâce à un programme de restauration de l'espèce lancé dans les années 1990, incluant des lâchers d'ours venus de Slovénie.
- Indemnisations -
D'après l'Office français de la biodiversité (OFB) qui a formellement identifié 96 ours grâce à leur empreinte génétique, le massif montagneux compte désormais entre 97 et 127 individus.
Les 16 chasseurs d'Ariège espèrent échapper à une condamnation, ainsi qu'aux lourdes indemnisations exigées par les associations défendant la présence de l'ours dans les Pyrénées, qui ont réclamé 100.000 à 175.000 euros, l'équivalent selon elles du coût du remplacement de l'ourse abattue.
L'un des participants à la battue qui a conduit à la mort de Caramelles estime que l'Office national des forêts (ONF) a sa part de responsabilité: "L'ONF, affirme-t-il, a laissé les battues se dérouler pendant 40 ans dans cette réserve".
Si les divergences de vue sont nombreuses entre chasseurs et écologistes, les parties civiles reconnaissent le caractère accidentel du tir mortel, tout comme l'accusation. Mais, souligne le procureur, le chasseur octogénaire "a pris sciemment le risque d'une confrontation avec l'ourse dans la réserve, qui est une zone de quiétude" pour cet animal.
Au-delà de la condamnation, Alain Reynes, directeur de l'association Pays de l'Ours, souhaite "que ce procès (fasse) avancer la réflexion sur la cohabitation entre chasse et ours".
V.Liu--ThChM