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"C'est là que mon aventure a commencé". Dans le musée de l'armée de l'air de New Delhi, Shivangi Singh, 29 ans, la seule Indienne aux commandes d'un chasseur Rafale revient avec "fierté" sur son parcours, qui pourrait l'amener à toucher les étoiles.
Il y a une vingtaine d'années, ici-même, elle découvrait avec ses yeux d'enfant ces vieux aéronefs, se prenant à rêver d'enfiler un jour une combinaison de pilote de chasse.
Très vite, l'écolière de la ville sainte hindoue de Bénarès (nord), comprend qu'elle doit exceller autant sur le plan académique que sportif.
S'imposant une discipline de fer, Shivangi Singh enchaîne de longues journées de 05H00 à 21H00, et devient championne de javelot et de basket.
Soutenue par ses parents, notamment sa mère qui lui a toujours souhaité son indépendance, cette fille d'un homme d'affaires intègre l'université puis l'Académie de la Force aérienne, avant de rejoindre l'armée de l'air.
Chignon impeccable sous son calot, elle reconnaît que sa vocation n'avait rien d'assurée dans un pays conservateur à la culture largement patriarcale.
- "Incroyablement grisant" -
La première Indienne n'a été autorisée à voler dans l'armée de l'air qu'en 1995 et il a fallu attendre 2015 pour qu'une femme endosse la combinaison de pilote de chasse.
"Depuis, nous sommes nombreuses. Cela ne traduit pas seulement la modernisation (de notre société) mais aussi le fait que nous pouvons désormais réaliser nos rêves", se félicite Shivangi Singh, les célèbres lunettes de soleil portées par Tom Cruise dans "Top Gun" à la main.
"Quand je me suis assise dans un cockpit pour la première fois, j'étais nerveuse et anxieuse", se souvient la lieutenant, mariée à un pilote de chasse.
Son premier vol solo a été, comme pour tous les pilotes, un moment "incroyablement grisant" car "personne n'était là pour atterrir à ma place".
Le jour où, enfin, cette jeune femme à l'allure sage mais au regard déterminé, s'est retrouvée aux commandes d'un MiG-21, "j'ai mesuré à quel point il faut avoir une grande maîtrise pour le contrôler".
Voler sur cet appareil construit sous l'ère soviétique "a été un privilège", ajoute-t-elle.
Les yeux de Shivangi Singh pétillent à l'évocation de ce souvenir mais elle dit manquer de mots pour exprimer son ressenti ce jour-là.
Après un rigoureux processus de sélection en 2020, elle a suivi une formation sur simulateur avec des instructeurs français avant de passer dans le cockpit d'un chasseur Rafale, produit par l'avionneur français Dassault Aviation.
- "Vyomanaute" -
Après une première commande de 36 exemplaires, l'Inde a annoncé lundi en avoir commandé 26 de plus pour sa marine de guerre, devenant ainsi le premier client de ce modèle à l'export.
L'expérience aux commandes du Rafale a été "complètement différente" de celle acquise sur les vieux MiG-21 de conception soviétique car il y a "plein de choses à gérer simultanément", tant en matière d'avionique que de puissance.
"Sa réactivité est impressionnante (...) le cockpit est incroyablement confortable, on a l'impression qu'il été conçu pour nous, c'est un espace convivial", juge Shivangi Singh.
En 2023, elle a fait partie du contingent de l'armée de l'air indienne (IAF) qui a participé, en France, à Orion, un exercice militaire interarmées et international de grande ampleur organisé par l'armée française tous les trois ans.
"Cela nous a permis de confronter nos expériences et d'apprendre les uns des autres".
Très loquace, la pilote se dit "fière" de son parcours. Un de ses meilleurs souvenirs ? Le jour où une écolière lui a dit qu'elle était une source d'inspiration et souhaiter, elle aussi, s'asseoir dans un cockpit.
"J'ai réussi dans un domaine longtemps réservé aux hommes et si j'y suis parvenue, alors les femmes peuvent désormais travailler dans n'importe quel secteur", veut croire la lieutenant.
Visant toujours plus haut, celle qui rêvait à l'âge de 10 ans de piloter un avion de chasse est désormais décidée à conquérir l'espace. Elle a commencé à s'entraîner pour devenir la première "vyomanaute", ou astronaute, de son pays.
H.Ng--ThChM