The China Mail - "Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie

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"Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie
"Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie / Photo: © AFP

"Au nom de toutes les autres", ou le combat de victimes de viols de guerre en Bosnie

Si Zehra Murguz a fini par témoigner des violences sexuelles dont elle a été victime pendant la guerre en Bosnie, c'est "aussi au nom de toutes les autres, au nom de cette fille de 12 ans qui ne parlera jamais", parce qu'elle "n'a jamais été retrouvée".

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A l'été 1992, l'horreur débute chez elle quand les forces serbes prennent la ville montagnarde de Foca, dans le sud-est de la Bosnie. Elle se poursuit au gymnase "Partizan" qui deviendra un lugubre centre de détention. C'est là qu'elle voit cette enfant arriver, "avec une poupée entre les mains", raconte-t-elle. Personne ne sait ce qu'elle est devenue.

Des dizaines de femmes musulmanes, des filles aussi, subiront sévices et viols collectifs, réduites pour certaines à l'état d'esclaves sexuelles des mois durant, quand d'autres seront vendues ou tuées.

L'ampleur des crimes de guerre dans cette partie de la Yougoslavie en plein démembrement est sans précédent dans l'Europe post-1945: au moins 20.000 victimes de violences sexuelles, la plupart Bosniaques, mais aussi des Serbes et des Croates.

Dès 1993, le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) est créé. Il devient le premier en Europe à reconnaître le viol comme constitutif de crime contre l'humanité, dans un verdict historique en 2001 qui concerne Foca et trois enfants de la ville devenus officiers de l'armée des Serbes de Bosnie.

Aujourd'hui, dans une Bosnie où seuls des juges bosniens statuent depuis une dizaine d'années, si une poignée de survivantes mues par une soif de paix recueille et fournit à la police des milliers de témoignages, beaucoup restent murées dans le silence.

- Agonie -

La machine judiciaire s'enclenche pour Zehra Murguz en 2011 quand à son retour en Bosnie, après des années au Monténégro, en Serbie et Croatie, elle se fixe comme mission de "traduire en justice le criminel" - son ex-voisin.

"Si je ne parle pas, ce sera comme si le crime n'avait pas eu lieu", se dit-elle. Localisé à Foca "où il ne se cachait pas", l'homme est arrêté et comparaît devant un tribunal local en 2012.

"C'était comme revenir en 1992", à l'"agonie" d'alors. La condamnation permet de le marquer du "sceau de son vrai nom: criminel de guerre", dit-elle depuis un local de couture à Sarajevo occupé par l'association "des victimes de la guerre Foca 1992-1995".

Autour d'elle, d'autres survivantes tissent, une forme de thérapie collective.

"A ce jour, seuls 18 verdicts ont été prononcés pour des crimes de violences sexuelles commis à Foca. Trois procès sont en cours. Beaucoup de temps s'est écoulé et les témoins sont épuisés", explique Midheta Kaloper, 52 ans, présidente de l'association. Elle a été victime à Goražde (est de la Bosnie) d'"un crime inexplicable, irracontable", la "pire torture qu'une fille puisse subir", et espère encore que le suspect sera jugé en Bosnie, et non en Serbie où il réside.

Elle note une "stagnation" depuis cinq ans, alors que 258 dossiers de crimes de guerre impliquant 2.046 suspects doivent encore être jugés par la justice bosnienne, selon les chiffres du Haut conseil des magistrats.

Au total, fin 2024, la justice de Bosnie-Herzégovine avait jugé 773 affaires de crimes de guerre, dont plus d'un quart impliquent des violences sexuelles, selon la mission de suivi de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui note "un retard important", notamment dans les centaines de dossiers où le suspect n'a pas encore été identifié.

"Ce qui nous tue le plus, c'est la longueur excessive de ces procédures", lâche Mme Kaloper.

- Bombe à retardement -

"Nous nous battons depuis 30 ans et notre seul véritable succès est d'avoir obtenu la loi sur les victimes civiles de guerre", déplore-t-elle.

Le texte prévoit notamment une pension mensuelle allant de 175 à 350 euros selon les territoires. Mais il ne concerne que l'entité croato-musulmane (Fédération de Bosnie-Herzégovine) et les personnes qui y vivent, et n'est pas harmonisé au niveau de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine, pays de quelque 3 millions d'habitants qui englobe Fédération de Bosnie-Herzégovine, Republika Srpska (RS, entité serbe) et district de Brcko (territoire autonome), où s'appliquent différentes législations, jurisprudences et pratiques.

Un millier de survivants ont obtenu ce statut de victime civile de guerre dans la Fédération, une centaine en RS et à Brcko, relève Ajna Mahmic, coordinatrice juridique pour l'ONG suisse Trial International.

Le viol, explique-t-elle, "est généralement lié à la stigmatisation, à la pureté du corps et de l'âme". "En tant que société, nous continuons à rejeter la responsabilité et la honte sur les victimes plutôt que sur les auteurs", dit-elle, ajoutant que "de nombreuses survivantes ne se sentent pas en sécurité, certains de leurs agresseurs travaillant dans des institutions publiques".

Sans parler de la glorification "des criminels de guerre et la minimisation des souffrances que nous avons subies", abonde Mme Kaloper. Ni de l'absence des accusés basés à l'étranger, qui constitue un "obstacle majeur" à la clôture de près de la moitié des affaires en cours, relève l'OSCE dans un rapport publié en janvier.

Autre "tendance préoccupante", selon l'OSCE: "l'échec généralisé des tribunaux à accorder une indemnisation aux victimes" au pénal. Quant aux compensations au civil, alors qu'au TPIY de La Haye (Pays-Bas) les témoins ont parlé sous couvert d'anonymat, en Bosnie aucune mesure de protection de leur identité n'est prévue au civil.

"Aujourd'hui encore, il est très difficile pour les victimes de parler", résume Bakira Hasecic, 71 ans, présidente de l'association des Femmes victimes de la guerre, et les filles d'alors gardent caché "le poids de cette tragédie dans leur cœur", épiant en silence leur bourreau présumé sur les réseaux sociaux.

"C'est une bombe à retardement qui peut exploser à tout moment et pousse certaines à nous appeler", dit-elle.

Ces derniers mois, 15 d'entre elles ont franchi le cap.

W.Cheng--ThChM