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Le Royaume-Uni, appelé à en faire davantage pour la libération de ses ressortissants arbitrairement détenus à l'étranger, s'apprête à imiter les Etats-Unis en nommant un émissaire chargé de cette question.
Le défenseur des droits humains égypto-britannique Alaa Abdel Fattah et le magnat des médias hongkongais Jimmy Lai, également citoyen britannique, incarcérés respectivement en Egypte et à Hong Kong, sont les deux cas les plus médiatiques.
Le ministère britannique des Affaires étrangères assure qu'il continue à faire pression pour obtenir leur libération mais des proches de ces détenus et des organisations des droits humains accusent les autorités de manquer d'empressement et de transparence.
"Le gouvernement est engagé à renforcer son soutien aux ressortissants britanniques, notamment par la nomination d'un nouvel émissaire", a déclaré un porte-parole du Foreign Office à l'AFP.
Le ministre pour le Moyen-Orient, Hamish Falconer, a précisé que cet émissaire pour les détentions "complexes" devrait être nommé "avant l'été".
- "Chose évidente" -
Le gouvernement n'a pas donné davantage de précisions sur ce poste mais il pourrait être comparable à celui d'envoyé présidentiel spécial pour les affaires d'otages créé aux Etats-Unis en 2015.
A la différence de ce pays toutefois, le Royaume-Uni n'effectue pas d'échanges de prisonniers.
La professeure Carla Ferstman, une experte des détentions arbitraires au Centre des droits de l'homme de la faculté de droit d'Essex, estime qu'une telle nomination serait "la chose la plus évidente à faire pour le Royaume-Uni".
"Quand vous avez affaire à quelqu'un au plus haut niveau, cela impose un certain respect", explique-t-elle à l'AFP.
Alaa Abdel Fattah a été arrêté en septembre 2019 en Egypte et condamné à cinq ans de prison pour "diffusion de fausses informations", après avoir partagé une publication Facebook dénonçant des violences policières.
Il est toujours emprisonné malgré sa grève de la faim, celle observée par sa mère et les déclarations de Londres assurant faire pression "au plus haut niveau du gouvernement égyptien" pour obtenir sa libération.
Sa soeur, Sanaa Seif, a dit à l'AFP qu'un envoyé spécial permettrait "un véritable suivi" et une meilleure coordination au niveau gouvernemental pour la libération des détenus.
- "Stratégie claire" -
Elle plaide par ailleurs pour que le gouvernement révise ses conseils aux voyageurs concernant l'Égypte, une demande également exprimée par des parlementaires qui suggèrent en outre de sanctionner des responsables égyptiens.
"N'est-il pas évident que les paroles ne suffisent plus ?", a récemment lancé devant les membres de la Chambre des lords le conservateur Guy Black.
Durcir les conseils aux voyageurs est un outil non négligeable, souligne Carla Ferstman. "C'est important, car tout à coup les touristes ne peuvent plus souscrire d'assurance et les voyages d'affaires deviennent plus difficiles", juge-t-elle.
Amnesty International a récemment appelé le gouvernement à définir une "stratégie claire" pour soutenir les Britanniques arbitrairement détenus, notamment en exigeant la présence de représentants britanniques aux procès.
Le gouvernement travailliste, mis en place en juillet 2024, s'était engagé pendant la campagne électorale à instaurer "un nouveau droit à l'assistance consulaire en cas de violations des droits humains".
- Réaction rapide -
Amnesty souhaite également qu'il réclame la "libération immédiate" des personnes concernées, y compris publiquement lorsque la famille en fait la demande.
Cette ONG souligne que Londres a attendu trois ans pour demander publiquement la libération de Jimmy Lai. Un retard qui, selon son fils Sebastian, "envoie un mauvais message" aux "Etats autocratiques".
"Plus vite le gouvernement s'exprime après une arrestation, plus la fenêtre pour obtenir une libération est grande", explique à l'AFP Eilidh Macpherson, d'Amnesty.
Jagtar Singh Johal, un blogueur sikh écossais, a été arrêté en Inde en novembre 2017 où il se trouvait pour son mariage. Il a été accusé d'être impliqué dans un complot terroriste contre des dirigeants hindous d'extrême droite.
Il n'a jamais été reconnu coupable de crime et, en mars dernier, il a été acquitté dans l'une des neuf affaires retenues contre lui.
Le ministre des Affaires étrangères, David Lammy, "continue de faire part de ses préoccupations" auprès du gouvernement indien "à chaque occasion appropriée", assure le Foreign Office.
Toutefois, le frère du blogueur, Gurpreet Singh Johal, regrette un manque de transparence. "Nous ne savons pas ce qui est réellement dit", confie-t-il à l'AFP. La nomination d'un émissaire serait, selon lui, "une bonne chose" mais, tant que le poste n'est pas officiellement pourvu, "nous ne saurons pas exactement ce que cela implique", relève-t-il.
B.Chan--ThChM