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La Première ministre du Népal Sushila Karki a réservé samedi sa première sortie aux blessés des émeutes meurtrières du début de semaine, au lendemain de sa nomination à la tête d'un gouvernement chargé d'organiser des élections en mars prochain.
Dans une capitale Katmandou où la vie revient lentement à la normale, Mme Karki a visité plusieurs hôpitaux, au chevet des victimes de la répression ordonnée par son prédécesseur KP Sharma Oli, contraint à la démission.
Au moins 51 personnes ont été tuées et des centaines d'autres blessés lors de ses troubles, les plus graves depuis l'abolition de la monarchie en 2008.
Nommée vendredi soir après trois journées de tractations, l'ex-cheffe de la Cour suprême a entamé au pas de charge son mandat à la tête d'un gouvernement provisoire.
Sitôt investie, le président Ramchandra Paudrel a ordonné la dissolution du Parlement et convoqué le 5 mars 2026 des élections législatives, une des revendications des jeunes contestataires réunis sous la bannière de la "Génération Z".
L'agenda de la première femme chargée de diriger le Népal s'annonce chargé et sa mission difficile, tant sont nombreuses les revendications des jeunes qui ont mis à bas l'ancien régime.
Sa nomination a été accueillie comme un soulagement par de nombreux Népalais.
"Ce gouvernement provisoire est une bonne chose", s'est réjouie Durga Magar, une commerçante de 23 ans. "On ne sait pas ce qu'il va se passer à l'avenir mais on est satisfaits (...) et on espère que la situation va maintenant se calmer".
"La priorité, c'est de s'attaquer à la corruption", a poursuivi la jeune femme. "On se moque de savoir si c'est la Génération Z ou des politiciens plus âgés qui s'en occupent, il faut juste que ça cesse".
"Je pense que cette femme Première ministre va (...) faire avancer la bonne gouvernance", a pour sa part estimé Suraj Bhattarai, un travailleur social de 51 ans.
Partie lundi de la colère suscitée par le blocage des réseaux sociaux, la fronde a débordé en révolte politique contre un gouvernement jugé corrompu et incapable de répondre à ses aspirations, notamment en matière d'emploi et de niveau de vie.
- Couvre-feu allégé -
Plus de 20% des jeunes népalais de 15 à 24 ans sont au chômage, selon les estimations de la Banque mondiale, et le produit intérieur brut (PIB) annuel par habitant frôle les 1.450 dollars.
La répression meurtrière des cortèges de protestataires a précipité les événements.
Mardi, les manifestants ont déferlé dans les rues de Katmandou et systématiquement incendié ou mis à sac tous les symboles du pouvoir: Parlement, bâtiments ministériels, résidences d'élus...
Incarnation des élites, le Premier ministre KP Sharma Oli, 73 ans, quatre fois Premier ministre depuis 2015, n'a eu d'autre choix que de démissionner.
Le chef du Parti communiste (maoïste) menait depuis 2024 une coalition avec un parti de centre gauche.
Quelques heures après la prestation de serment de la nouvelle Première ministre, l'armée a allégé samedi matin le couvre-feu en vigueur dans la capitale et les autres villes du pays.
A Katmandou, chars et blindés se sont faits plus discrets, les commerces et marchés ont retrouvé leurs clients et les temples leurs fidèles.
Sushila Karki a travaillé samedi à la composition de son gouvernement, selon son entourage.
Plusieurs ONG de défense des droits humains, dont Amnesty International ou Human Rights Watch, l'ont appelée samedi à mettre un terme à la culture de "l'impunité du passé".
L'une de ses tâches immédiates sera aussi d'assurer le retour à l'ordre dans tout le pays.
A commencer par remettre la main sur 12.500 détenus qui ont profité des troubles pour s'évader de leurs prisons et étaient toujours en cavale samedi.
Q.Moore--ThChM