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Son petit goût de menthe et sa forme octogonale ravivent les souvenirs d'enfance: 1,4 million de pastilles de Vichy (Allier) sont consommées chaque jour, signe d'un succès populaire qui ne se dément pas, 200 ans après leur création.
"Ca me rappelle mon enfance. Ma grand-mère, mon père, c'était leur bonbon préféré. Il y avait toujours une boîte de (pastilles de) Vichy à la maison" raconte Luce Saigne, 67 ans, cliente d'une boutique vichyssoise où elle vient d'acheter un "stock" de pastilles, appréciant particulièrement la saveur anis.
C'est en 1825 qu'un chimiste, Jean-Pierre-Joseph d’Arcet, a l'idée de créer un bonbon à partir des sels minéraux de l'eau de Vichy, connue pour ses vertus digestives.
La pastille est d'abord vendue comme médicament, en pharmacie, et prend sa forme octogonale une trentaine d'années plus tard. Les confiseurs obtiennent ensuite le droit de la commercialiser.
Lancées en 1932 à la suite de l'acquisition de la source Roger, les pastilles du Bassin de Vichy appartiennent toujours à la famille Moinet.
Dans son usine, où plane une entêtante odeur de menthe, les sels minéraux extraits de sa propre source située à quelques kilomètres, sont mélangés au sucre et aux arômes, produisant une poudre blanche qui forme la pastille, après compression.
Des employés vérifient scrupuleusement son poids -- 2,8 grammes -- et sa dureté.
-Un "côté chic"-
"Il y a 50 ans, c'était un produit un peu vieillot, un peu ringard mais qui aujourd'hui (..) a trouvé un public plus jeune, s'est dynamisé" et "depuis dix ans, elle est redevenue à la mode, avec un côté un peu chic", avance Lucas Michaille, 34 ans, responsable de production à l'usine d'Hauterive et septième génération de la famille Moinet.
La recette a peu évolué: passée de médicament à confiserie, la pastille contient "moins de sels minéraux et un peu plus de sucre", dit-il.
Il y a 200 ans, "c'était une petite révolution. Les gens venaient en cure à Vichy pour (...) les eaux thermales, se soigner et cela a été vraiment une nouveauté: vous pouviez rapporter les bienfaits avec vous!", raconte le trentenaire.
Thé, limonade, liqueurs, sirop, glaces, bougies: la pastille se décline sous toutes les formes dans les boutiques du confiseur -- deux à Vichy, une à Paris et une à Clermont-Ferrand.
Plus ancienne confiserie de la ville thermale, elle propose également des spécialités régionales dont certaines sont toujours fabriquées dans l'arrière-boutique historique du centre-ville: pâte de fruits d'Auvergne, bonbons glacés du Bourbonnais, sucres d'orge de Vichy, etc.
Mais la pastille, vendue sous sa propre marque et sous des marques distributeurs (MDD), représente 80% de la production en volume et 50% du chiffre d'affaires.
-Nationale 7-
La classique menthe reste l'arôme le plus demandé (95% des ventes), selon Lucas Michaille, devant les parfums orange, anis ou citron.
"Je n'en ai pas mangé depuis 73 ans (...) je voulais regoûter et en offrir à des amis. En voiture, on passait sur la nationale 7, on s'arrêtait à Vichy, on achetait des pastilles, ça coupait le mal de coeur", raconte Maryse Desrats, 77 ans.
"On n'avait pas de tablettes, on chantait, ça donnait soif alors on mangeait des pastilles!", se souvient-elle encore, en sortant de la boutique Moinet, sachet à la main.
Pour célébrer ce bicentenaire, la ville de Vichy, où ont été installées des pastilles géantes, organise de nombreux événements jusqu'au mois de novembre en partenariat avec les deux fabricants: expositions, visites guidées, spectacles, conférences, escape game.
Elle a par ailleurs annoncé vouloir engager une démarche en vue d'obtenir le label IGP (indication géographique protégée).
U.Feng--ThChM